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Sexisme et violences sexuelles : Où en est l’enseignement supérieur ?

Etat des lieux


Nombreux ont été les scandales liés au sexisme dans l’enseignement supérieur.

De la « pute du mois » au « Paye ta fac », en passant par la tribune « Nous aussi » et par les enquêtes alarmantes de Mediapart, le voile se lève peu à peu sur le sexisme, souvent au détriment de l’image des écoles. La parole se libère enfin, et de plus en plus d’étudiant.e.s témoignent de leurs expériences sexistes au sein de leur école.

Les écoles sont un reflet de notre société, pas étonnant donc d’y retrouver le meilleur comme le pire. Le sexisme en école existe, ne pas le voir ne signifie pas qu’il n’existe pas.

L’environnement des écoles, en particulier celui des écoles de commerce, favorise parfois les comportements sexistes. On peut penser notamment aux chants d’associations, mais aussi aux soirées alcoolisées entre étudiant.e.s qui favorisent parfois les dérapages. Certains étudiant.e.s se permettront plus facilement de dire ou de faire certaines choses avec de l’alcool dans le sang, que lorsque vous les croisez dans les couloirs de l’école ou dans une salle de classe, c’est indéniable.

Je pense néanmoins que, bien que ces facteurs favorisent ce type de comportements, la raison principale expliquant de telles paroles ou actes sexistes est le manque d’éducation. Le manque de connaissances joue un rôle essentiel et il est du rôle des parents, ou à défaut, des écoles de former les générations de demain.

Pour illustrer mes propos, prenons un exemple sur le consentement :

Après une soirée alcoolisée, vous décidez de raccompagner votre ami.e, ivre, sur qui vous avez des vues. Vous intentez une approche, pour lui faire comprendre que vous espérez un peu plus que de rester sur le pas de sa porte, mais votre ami.e refuse poliment vos avances. Vous décidez d’insister pendant plusieurs minutes, et votre ami.e. fini par céder et vous avez un rapport sexuel.

Deux infractions peuvent être caractérisées dans cet exemple :

  1. Certains auraient tendance à simplement qualifier cela de drague lourde, mais après un refus, insister relève du harcèlement sexuel.

  2. D’autre part, ayant consommé de l’alcool, votre ami.e n’était pas forcément en état de consentir. Vous encourez le risque d’être accusé de viol.

A parte : Je n’utilise habituellement pas l’écriture inclusive, mais c’est volontaire de ma part dans cet article afin de mettre en avant qu’autant les hommes comme les femmes peuvent être l’auteur de sexisme ou en être la victime.

Est-ce à dire que toute personne sous l'emprise de l'alcool ou de la drogue est incapable de consentir à une relation sexuelle et qu'il s'agit, dès lors, d'un viol ? Non. Mais le consentement n'est pas valide si l’on a consommé, et on peut se croire en état de consentir, parce que les effets de l’alcool ou des drogues altèrent nos capacités et notre jugement. Mieux vaut donc éviter d’avoir un rapport sexuel avec une personne alcoolisée.

Pour certain.e.s, ces conclusions relèveront de l’évidence (et tant mieux !), mais pour d’autres, le consentement n’est pas toujours aussi évident à comprendre. C’est pour cette raison qu’il est essentiel que l’éducation aborde ces notions, et ce, dès le plus jeune âge, d’autant que parfois, le sexisme est plus subtil et n’est pas si évident à repérer. C’est notamment le cas du sexisme ordinaire.

S’éduquer, s’informer, serait donc le meilleur remède contre le sexisme.


Que font les écoles ?


De plus en plus d’écoles prennent le sujet très au sérieux, et de nombreuses initiatives étudiantes prennent forme pour combattre le problème.

Une ancienne élève de l’EDHEC, Marine Dupriez, a notamment fondé, en 2019, Safe Campus, un dispositif sous forme d’accompagnement visant à évaluer les dispositifs mis en place par les écoles, à former le personnel et à sensibiliser les étudiant.e.s.

D’autres initiatives se mettent également en place : Le BNEM (Bureau National des étudiants en Ecole de Management) travaille sur un projet de mise en place d’une charte contre les violences sexistes qui serait commune à toutes les écoles de commerce. Aujourd’hui, 17 écoles sont représentées au sein du BNEM.

A Grenoble Ecole de Management, le baromètre du sexisme, conduit par la chaire FERE (Femmes Et Renouveau Economique) et par le Collectif Réagir, un regroupement d’étudiant.e.s luttant contre les discriminations, met en lumière les actes et comportements sexistes au sein de l’école.

En 2018, ce baromètre a révélé que 9,8% des étudiant.e.s de l’école déclarent avoir déjà été victimes de harcèlement ou de violences(s) dans au moins un des lieux qu’ils fréquentent régulièrement. Cela peut sembler peu, mais c’est encore trop.

Pour lutter contre le sexisme, GEM a récemment mis en place un dispositif de signalement pour permettre aux étudiants de signaler tout comportement sexiste, et propose également un accompagnement psychologique et juridique.

L’école a également dispensé une formation pour sensibiliser les étudiants de deuxième année en parcours associatif sur les violences sexistes et sexuelles.

Cette formation était co-animée par deux anciens étudiants de l’école, Guillaume Semene (responsable de la communication du réseau Pride BNP Paribas) et par Flora Goldgran (fondatrice du Collectif Réagir).

Après cette formation, Flora nous a fait part de son expérience.


Témoignage de Flora Goldgran, fondatrice du Collectif Réagir


« Aujourd'hui, j'ai pris la parole lors d'une formation à destination des étudiants portant des responsabilités au sein des associations de Grenoble Ecole de Management. Le sujet ? Les violences sexuelles et sexistes. C'était la première édition institutionnelle de cette formation, et un événement pour l'Ecole qui revient de loin sur le sujet.

Il y a 4 ans, […] nous avons fondé le Collectif Réagir […].



Nous partions d'un double constat :

  1. La culture du viol était terriblement ancrée dans la culture étudiante et on en souffrait à divers degrés.

  2. 2. L'école ne faisait rien pour lutter contre cela. Rien. On a cherché pourtant. Pas de prise de position, pas de dispositif d'alerte, pas d'actions de prévention, pas de limite en somme.

Aujourd'hui, face aux étudiants et à l'administration, j'ai décrit cette absence et l'impact du sexisme et des violences sexuelles dans ma vie d'étudiante. J'ai raconté haut et fort les histoires qu'on aurait voulu enterrer. Pour l'exemple. Surtout, j'ai parlé.

J'avais cette tribune pour le faire. Car aujourd'hui, 4 ans après, l'école a pris ses responsabilités. Elle s'est doté d'un dispositif d'alerte pragmatique, bienveillant, impartial et discret. Elle a monté une cellule d'experts mobilisés sur le sujet. Elle a désigné et formé des interlocuteurs pour recueillir la parole des étudiant.e.s. Elle forme et sensibilise ses étudiants, à commencer par ceux qui ont des responsabilités au sein des associations, hauts lieux de la vie étudiante.

Les violences sexistes et sexuelles ne sont plus cachées sous le tapis. Elles sont projetées en grand sur les écrans de l'auditorium. Elles sont racontées sans langue de bois dans les micros de la salle. Elles se glissent avec bienveillance dans la poche des étudiant.e.s et sur les tables des locaux assos à travers le numéro d'assistance psychologique et l'adresse mail de signalement.

Les générations d'étudiants se succèdent et se transmettent leurs postes, leurs couleurs, leurs rites, leurs chants, leurs culture mais aussi leur histoire. Chaque génération a le pouvoir de transmettre quelque chose de plus à la suivante. Chaque génération a donc un rôle à jouer dans cette chaîne de solidarité afin de construire une atmosphère inclusive et respectueuse. C'est entre leurs mains. C'est leur responsabilité. Et c'est la responsabilité de l'Ecole de les encadrer et de les soutenir dans cette démarche.

Je suis émue de voir que tout le chemin parcouru. #Meetoo et #Balancetonporc sont évidemment passés par là, mais le Collectif Réagir aussi, soutenu par les bonnes personnes. Il y a 4 ans, nous n'imaginions pas l'impact que nous pourrions avoir. Mais les choses ont bel et bien évolué dans le bon sens.

Il reste du travail et il faut rester vigilant.e.s, toujours, mais je suis pleine d'espoir pour les années à venir. »

On peut donc dire qu’il y a une véritable avancée et une véritable prise de conscience, tant du point de vue des administrations que du point de vue des étudiants, mais que le chemin est encore long à parcourir !

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